Hier, vendredi 5 juin, lors de son point de presse quotidien sur l’état de la pandémie, le ministère de la Santé a laissé une fois de plus entendre que la situation était sous contrôle, alors que le nombre de personnes déclarées atteintes par le virus a atteint le millier. Les pessimistes s’en inquiètent beaucoup et commencent à douter de la capacité du gouvernement à juguler la spectaculaire progression du virus. Depuis la fin du mois de Ramadan, on note de fait une tendance à la hausse des cas, poussant le gouvernement à solliciter les services de l’armée pour renforcer le dispositif de riposte. La situation ne sera contrôlée, semble-t-il évident, que si les citoyens mauritaniens respectent les mesures-barrières et se rendent dans les centres hospitaliers au moindre signe d’alerte. Plusieurs personnes atteintes par le virus n’ont pu être sauvées parce qu’elles ont trop hésité ou tardé à se présenter dans un centre de santé. Une attitude malheureusement encouragée par la campagne de dénigrement qui s’est développée ces dernier temps sur la manière dont les patients y sont accueillis. On ne va pas au centre de santé de peur de s'y révéler infecté.
Dans ces conditions et avec le peu de respect des mesures-barrières par les Mauritaniens qui continuent à s’entasser dans les commerces, les voitures de transport les bureaux et les salons, il semble difficile, voire impossible de mettre réellement la situation sous contrôle. Le directeur général de la santé publique ne cesse de le marteler chaque jour lors de son point de presse : pour gagner la bataille, les Mauritaniens doivent changer de comportements et s’adapter à la pandémie. Tout un chacun doit respecter les mesures-barrières que personne ne peut aujourd’hui ignorer : se laver les mains régulièrement quand on travaille ou touche des objets, rester à un mètre de distance les uns des autres et surtout porter un masque pour se protéger et protéger autrui. On note déjà que celui-là commence à entrer dans nos habitudes quotidiennes, même si certains le portent très mal, d’autres ne cessent de le remonter ou de l’enlever carrément, notamment pour communiquer. Son commerce est devenu très florissant, nombre de nos tailleurs en confectionnent de bonne quantité et les commerçants vous les proposent à un prix acceptable. Le gouvernement doit encourager cette option. L’usage du gel s’est aussi développé mais son coût reste encore élevé pour la plupart des gens qui peuvent tout de même utiliser un savon ordinaire. Quant aux lavabos publics et privés, beaucoup ne fonctionnent quasiment plus.
Les Mauritaniens sont certes têtus et indisciplinés mais cela suffit-il à expliquer la montée en flèche des cas déclarés, le relativement faible taux de guérison et la poussée du nombre de décès ? Certes, cinquante morts en trois mois, c’est fort peu au regard du nombre total de décès dans tout le pays, durant cette même période, et, surtout, mille cas déclarés (dont 5 % de morts donc), c’est à peine 0,025 % de la population (1 cas sur 4 000) : c’est à ces pourcentages, objectivement comparés à ce qu’ils sont ailleurs – chez nos voisins, par exemple, ou en d’autres pays autrement mieux équipés, comme la France ou les USA… – qu’il conviendrait de juger les efforts du gouvernement. Mais on attend tout de même ses explications sur la gestion des fonds mobilisés pour lutter contre la pandémie et il doit d’autant moins hésiter à faire respecter les mesures prises pour protéger les citoyens qu’en dépit du couvre-feu et de l’interdiction de voyager entre les régions, le virus continue à circuler. Non pas à petite vitesse, comme en France, mais de façon inquiétante. Il faut agir. Et vite, parce que le comité interministériel chargé de gérer le COVID donne l’impression d’avancer, lui… à pas de tortue.