Certains mauritaniens tentent depuis quelques jours de déplacer les raisons et les circonstances de l’interpellation de l’ancien président par La police chargée des crimes économiques et financiers vers un terrain politique plutôt que celui de la justice. Pourtant, la situation dans laquelle se trouve l’ancien président résulte d’une suite logique de la progression d’une procédure qui entre dans le cadre d’une enquête menée par une commission parlementaire qui a joué son rôle d’investigation préliminaire. Il est tout à fait logique que cette investigation débouche à présent sur une enquête préliminaire par une institution auxiliaire de justice.
Le Ministère public a, dans un communiqué rendu public, justifié les raisons de l’interpellation de l’ancien président. Le porte-parole de l’autorité judiciaire officielle mauritanienne, -donc voie autorisée,- a expliqué que cette interpellation entre dans le cadre de l’enquête préliminaire actuellement menée par la Direction de la lutte contre la criminalité économique et financière.
Le communiqué précise qu’au vu des conclusions de l'enquête parlementaire, et pour complément d’informations la direction de la sureté de l’état a convoqué un des « suspects » et cela conformément aux dispositions des articles 55 à 55 67 68 du Code de procédure pénale.
Le mot « suspect » employé par le parquet pour désigner l’ancien chef de l’état, explique à lui tout seul la tournure que prennent les évènements. Ce qui se traduirait par « la justice mauritanienne à travers sa police judiciaire » a fait convoquer un suspect pour l’entendre.
On a donc comme l’impression que la justice évite de se laisser influencer par ce que représentaient la qualité et le rang de l’accusé, qui, interpellé n’est au vu de la loi qu’un « suspect ». Celui qui est aujourd’hui dans les locaux de la police des investigations criminelles à caractères économiques n’est pour le moment qu’un accusé, donc présumé innocent tant que sa culpabilité n’est pas établie par des faits et des preuves matérielles. Et meme si c’est donc un sale temps pour Ould Abdel Aziz, qui pensait que son immunité, sa folie des grandeurs et son arrogance pouvaient empêcher de le convoquer pour l’entendre. L’homme fort des dix années qui viennent de s’écouler, est dans une situation « peu confortable ». Un accusé appelé à « éclairer » (pas par énergie solaire), mais cette fois par des preuves irréfutables, les enquêteurs sur des détails importants pour situer sa responsabilité et celles des autres prévenus déjà entendus qui ont pour certains d’entre eux déclarés avoir agi sur ordre reçus de celui qui est rentré comme simple citoyen visé par une enquête dans ce beau bâtiment de la DGSN qu’il a fait construire.
Dans la presse certains rapportent que « l’invité » de la DGSN refuse de parler beaucoup comme le souhaitent les policiers. En refusant de répondre aux questions, Ould Abdel Aziz, suspect pose des problèmes aux enquêteurs qui veulent boucler une enquête judicaire « une fois pour toutes ». Si en plus, il refusait de reconnaitre que c’est bien lui qui était derrière les agissements de ses collaborateurs, de ses premiers ministres, de ses ministres et de certains de ses « très proches », tous risquent de payer des pots qu’ils n’ont pas cassés.
Ce serait dommage pour eux parce qu’il est évidement qu’ils ont agis sur ordres de l’homme étouffé maintenant par ses bricolages de chef d’état véritable chef d’orchestre de machinations invraisemblables. Cette déduction vient du fait que nous savons tous qu’aucun ministre quel qu’il soit, ne peut prendre une initiative comme celles qui font l’objet d’enquête policière qui complète l’enquête parlementaire.
La confrontation entre Ould Abdel Aziz, ses premiers ministres, ses ministres, et certains de ses proches peut tourner au « vinaigre » si l’ancien président faisait preuve de « lâcheté » ou de « trahison ». Il est évident que s’il refuse de reconnaitre les faits qui lui sont reprochés et sa responsabilité dans la prise de décisions qui sont à l’origine de la signature d’accords contournant les règles de procédures et les textes d’application en matière de marchés publics, les autres accusés seront « enfoncés » jusqu’au cou.
Tout se joue maintenant dans la conduite que tiendra le principal « suspect », celui qui refuse pour le moment de coopérer avec les limiers qui ont été sans doute sélectionnés tenant compte du calibre de celui qu’ils cherchent à « cuisiner » avec des interrogatoires musclés. Si ce suspect considéré le numéro un, persiste et signe pour affirmer qu’il n’est derrière aucune des décisions prises relatives aux marchés considérés cédés sur fond de corruption, il va manquer de la place dans la maison d’arrêt à laquelle seront envoyés tous les accusés et toutes les personnes considérées complices dans ses manigances frauduleuses.
L’ancien président bénéficie de la présomption d’innocence. Même les charges retenues contre lui ne font pas de lui pour le moment un « reconnu coupable ». Ce sera à la justice, la haute cour de justice d’essayer de rétablir la vérité toute la vérité et rien que la vérité dans ces affaires rocambolesques. Tâche qui ne sera pas facile, si l’on sait que le principal « suspecté » a, selon certains, menti 11 ans durant au peuple mauritanien et dans ce cas, il serait bien capable aussi de mentir à la police et plus tard à la justice.
Mais, il est sensé savoir que rien ne peut résister aux preuves que peut rassembler la police lorsqu’elle décide ainsi. Et le président ne doit pas perdre de vue que cette police qui l’interroge aujourd’hui est « sa police ». Une police que son règne d’une décennie a rodé sur « un penchant » indéfectible pour le pouvoir. Le pouvoir en place, pas celui qui était en place qui, j’ai comme l’impression est désormais classé sans suite.
Quoiqu’il en soit, Ould Abdel Aziz est dans de beaux draps. Avant de se retrouver devant un juge d’instruction, qui pourrait être si le pouvoir le veut, un juge avec lequel il a eu un antécédent quand il faisait la pluie et le beau temps, la police peut prendre tout son temps pour trouver assez de preuves matérielles pour enfoncer celui qui n’a jamais eu vraiment beaucoup de considération pour ce corps, qui, pour lui, ne reflétait plutôt que le visage de celui qui était le plus puissant directeur de la sureté nationale de toute l’histoire de la Mauritanie, qui était par la suite chef de l’état et qui est mort dans des conditions qui suscitent pour certains beaucoup d’interrogations.
Ould Abdel Aziz a devant lui beaucoup de « mauvais quart d’heures ». D’autant plus que la police a récupéré ses portables. Elle fera donc comme toutes les polices du monde. Pendant que certains policiers le « cuisinent », d’autres se mettront évidemment à faire parler les portables, ce qui peut apporter de nouveaux éléments à ceux qui n’étaient pas encore élucidés.
J’ai bien peur que le retour d’Aziz dans son domicile ne soit désormais qu’un rêve pour lui et pour ses soutiens. Aziz a ses droits. La police est dans ses droits. La justice aussi. Aziz a le droit de garder le silence et de ne parler qu’en présence de son avocat. Mais Biram Ould Dah Ould Abeid aussi avait ses droits chaque fois qu’il avait été arrêté par la police. Mais il n’a jamais cessé de crier que jamais on ne lui a accordé ces droits ni durant les interrogatoires ni durant ses gardes à vue. Et c’est justement lui Aziz qui avait fait de la police et de la justice, des instruments espèces de tournesols qui ne se déplacent suivant le regard de l’homme fort au pouvoir.
On ne récolte que ce qu’on a semé. Onze ans durant Ould Abdel Aziz a semé la pagaille. J’ai bien peur que cette fois se soit la pagaille qui est entrain de le « semer ».
Mohamed Chighali.