L’embuscade d’Aroueidil /Par le colonel (E/R) Mohamed Lemine Ould Taleb Jeddou

dim, 15/11/2020 - 10:08

Le 14 Octobre 1977, Un convoi de Ravitaillement escorté par un sous-groupement composé de quatre unités dont deux compagnies parachutistes marocaines commandé par le Lt Bellahi Ould Mouloud est attaqué à 09:15 à Aroueidil, près de soixante dix  kilomètres au sud de Bir Moghrein, par une Katiba ennemie d’une centaine de véhicules. A 06:00 du matin, le sous-groupement quitte la ville de Zouerate à destination de la garnison de Bir Moghrein.

Les quatre cents kilomètres de terrain séparant Zouerate et Bir Moghrein se présentent en quatre compartiments, traversés par une unique pénétrante, la Route No 1 ou Impériale, qui traverse la Mauritanie sur toute sa longueur nord-sud.

Une zone montagneuse constituée d’une noria de guelbs éparpillés dont les plus significatifs sont Tenyemoumatt, Galb ElGhein, Tizerghavatt dont le point culminant est Amkheiwel Tizerghav, Mkade Leghnem, Galb Lehdid, Gleib Jrad et Smamit, s’étend de Zouerate jusqu’à une soixantaine de kilomètres au nord.

A cette zone montagneuse succède un glacis de près de 200 kilomètres de longueur, avec de sporadiques petits escarpements, si plat qu’une crotte de chameau peut être vue de très loin donnant l’impression d’être un guelb et qui se termine par une saline très spongieuse, d’accès difficile, Sebkhet Oum Drous.

Le terrain dans ce compartiment, est roulant, très ouvert, particulièrement favorable aux déploiements et peu propice aux embuscades.

Ce compartiment est coupé perpendiculairement par une rocade, Rich Enajim, une succession de falaises orientées est-ouest où affleurent quatre Richatt, des petits guelbs, dont la plus à l’ouest est Richet Meimoune où verse Aroueidil, un oued qui prend sa source de Boudayra.

Le sous-groupement se déplaçait en deux échelons; une avant-garde, le 4 Escadron de Reconnaissance (ER) commandé par le S/lt Mbaye Diaye Fall en tête, suivie des deux compagnies marocaines sur les deux flancs et le gros constitué de l’élément de commandement, du convoi de ravitaillement et deux batteries d’artillerie marocaines sous la protection de la 1ère Compagnie des Commandos Parachutistes (1CCP) commandée par le S/lt Niang Mamadou Moustapha dit Sala, le Rude pour les intimes, à trois kilomètres de l’avant-garde.

Vers 18, le sous-groupement s’arrête en vue de Rich Enajim et passe la nuit, pour redémarrer le lendemain à 08:00. L’ennemi qui savait qu’un convoi de ravitaillement passait mensuellement en direction de Bir Moghrein avait eu largement le temps de mettre en place son embuscade entre Boudayra et Richet Meimoune, interdisant le franchissement du passage entre les deux montagnes en occupant les récifs les plus significatifs qui contrôlent le terrain.

Au fur et à mesure que le jour avançait un vent poussiéreux se leva réduisant le contact visuel entre les unités.

A huit cents mètres de l’Oued Aroueidil, l’ennemi ouvre le feu. La formation initialement aérée du sous-groupement, mettant l’accent sur le facteur sûreté avec le 4 ER en pointe, a permis de limiter considérablement les effets dévastateurs de la surprise qui constitue généralement le facteur déterminant du succès d’une embuscade.

Le 4 ER réagit par le mouvement et mènera un combat mobile face à un ennemi à terre. Contrairement au 4 ER, les paras marocains effectuent des mises à terre sur le billard qui leur seront fatales.

Le commandant de sous-groupement réagit par la mise en œuvre des deux batteries d’artillerie marocaines, ramène au loin vers l’arrière le convoi de ravitaillement dont il assure la sécurité avec une partie de l’élément de commandement et une partie de la 1 CCP, se réorganise et mène le combat contre l’ennemi manœuvrant avec le 1 ER et le reliquat de la 1CCP.

Le 1 ER et la 1 CCP accuseront des pertes relativement limitées grâce à leur mobilité. Ce sont surtout les deux unités parachutistes marocaines qui payeront le plus lourd tribut.

Informé sans délais, le Cdt de la Deuxième Reégion Militaire demande à l’Etat-major la mise à disposition d’un avion pour un poste de commandement Volant (PCV). L’accrochage continuera jusqu’à 12;30. Vers 13:00 un sous-groupement de Bir Moghrein commandé par le capitaine Diaby Camara renforcé d’une batterie d’artillerie en intervention, accroche l’ennemi à l’ouest de Richet Meimoune.

L’ennemi refuse le combat et se replie en direction du Nord-est.

A 12:40, alors qu’un Defender PCV (Poste de Commandement Volant) avec à bord le commandant de la 2 RM décollait de Zouerate, une escadrille de F5 marocaine arrive sur zone mais ne pourra intervenir du fait des mauvaises conditions climatiques .

Vers 13:30 le cdt de la 2 RM se pose sur le lieu de l’accrochage. L’ennemi qui s’est replié avait deux alternatives: soit aller dans la direction Tourassine-Zadnas-Tmeimichatt Ghallaman – Ouad Elma, soit dans la direction Tourassine – Tenebou – Iguitti.

Seule une reconnaissance aérienne pouvait situer sur l’option prise par l’ennemi. Seulement l’avion devait en priorité procéder à des évacuations urgentes, ce qui donnera à l’ennemi un temps relativement important pour creuser l’écart avec les unités.

Le lendemain de l’accrochage, la station radio du Secteur 1 capte une information faisant état de l’intention d’un ennemi regroupé à Tiguermit d’attaquer un poste ami et demande l’autorisation de tendre une embuscade au nord de Matt Elham sur la ligne Sbei Jaya – Maziat.

Le 16/10 dès 07:00 le Defender Alpha Victor effectue une reconnaissance Zouerate – Bir Moghrein.

Mohamed Lemine Ould Taleb Jeddou

Extrait de la “Guerre Sans Histoire”